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La gestion de l’Ordre National des Médecins du Cameroun (ONMC) n’a jamais suscité autant de critiques et de recadrages de la part du ministre de la Santé depuis sa création en 1957. En seulement six mois, cinq lettres de recadrage ont été envoyées, dont une du résident de l’Assemblée générale de l’ONMC et quatre par le ministre de la Santé publique au président du conseil de l’ordre. Les dates de ces lettres sont le 9 avril 2024 pour le rappel de constitution des dossiers, le 13 juin 2024 pour les dossiers sans visa du ministre, le 3 juillet 2024 pour l’exercice de la télémédecine, et le 4 juillet 2024 pour la procédure d’accueil des campagnes de santé des missions étrangères. Les décisions prises par le nouveau président de l’ONMC, le Dr Rodolphe Fonkoua, sont souvent en contradiction avec la vision du gouvernement camerounais qui œuvre pour un accès aux soins de santé de qualité pour tous.
Élu en décembre 2023, cela fait exactement six mois que le Dr Fonkoua dirige l’ONMC. Critiqué pour sa gestion opaque et son autoritarisme, de nombreuses voix parmi les médecins appellent à une prise de conscience urgente et à une réforme profonde de l’ONMC. « Le temps de l’impunité doit cesser pour faire place à une gestion transparente, démocratique et respectueuse des lois. L’avenir de l’Ordre en dépend », déclarent-ils.
Rivalités de Compétences
Dans une correspondance adressée le 31 mars 2024 par le président de l’Assemblée générale de l’ONMC au président du conseil de cette même institution, le Dr Jules Ndjebet décrit le climat tendu entre les deux hommes. « Il m’est loisible de revenir à vous, de nouveau, par la présente lettre, après plusieurs relances orales non prises en compte, relativement à l’organisation de notre assemblée générale extraordinaire du 5 avril 2024, qui se tiendra à la maison du médecin sise à Yaoundé-Nkol-Eton. Il n’est point besoin de vous rappeler la place centrale qui échoit au président de l’Assemblée générale de l’ONMC dans l’organisation et la gestion d’une assemblée générale, qu’elle soit extraordinaire (voir règlement intérieur et code de déontologie de l’ONMC adoptés par l’Assemblée générale extraordinaire du 13 mai 2022, tenue au palais des congrès de Yaoundé, et rendu exécutoire par arrêté N°5816/A/MINSANTE/CAB du 21 juin 2022). »
Dr Ndjebet insiste sur le fait que Dr Fonkoua semble se substituer à sa fonction en organisant l’assemblée générale extraordinaire sans requérir son avis. « De manière constante et de fait, vous semblez vous substituer à ma fonction, en mettant sur pied votre organisation de cette assemblée générale extraordinaire, jusqu’à son déroulé sans daigner requérir le moindre de mes avis et quand même un avis est émis, vous l’éludez avec délicatesse », écrit-il.
Six Mois de Gestion Critiquée
Six mois après sa nomination, les médecins reprochent au Dr Fonkoua ses méthodes autoritaires, des dépenses hors des lignes budgétaires, l’éviction de la trésorière, des voyages coûteux non justifiés, le bicéphalisme à la tête de l’ordre, et le report de l’assemblée générale sans budget de fonctionnement. Élu à la tête de l’ordre, Dr Fonkoua a écarté la trésorière légitimement élue, agissant ainsi dans l’opacité. Il a également nommé en violation de la loi des représentants régionaux de l’ordre et leur a alloué des financements injustifiés, constituant un détournement de fonds publics.
La Télémédecine en Jeu
Malgré l’implication du ministre de la Santé, qui travaille actuellement à la mise en place d’une plateforme informatisée pour faciliter la télémédecine, Dr Fonkoua se montre hostile à cette initiative. La télémédecine est pourtant une réponse appropriée aux besoins de santé des populations, en particulier celles éloignées des centres médicaux. Cependant, l’ONMC semble déterminé à freiner son déploiement, malgré l’absence d’un cadre législatif clair.
Depuis son élection, Dr Fonkoua défie le ministre de la Santé en rendant l’accès aux soins plus coûteux et en sabotant le programme de télémédecine. La lettre de recadrage du 4 juillet 2024 marque la désapprobation du ministre concernant la décision du président du Conseil de l’ordre de facturer les campagnes de santé des missions étrangères. Ces campagnes, organisées régulièrement par les médecins de la diaspora, sont cruciales pour aider les populations des zones rurales.
Le Cameroun est à la croisée des chemins. Embrasser pleinement la télémédecine pourrait transformer positivement son système de santé, mais cela nécessitera de surmonter les résistances enracinées dans des intérêts particuliers et de mettre en place un cadre législatif adapté. C’est un défi que le pays doit relever pour entrer pleinement dans l’ère de la médecine moderne.
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